29/09/2025

Les entrées et les sorties d’actionnaires de SRL

Centrius a développé une expertise pointue en matière de transferts d’entreprise, de cessions d’actions et de pactes d’actionnaires, qui s’avère très utile dans le cadre de la négociation, de la rédaction et de la conclusion de conventions « sur mesure », adaptées à chaque dossier.   

Il nous a semblé judicieux de rappeler et d’analyser, dans cet article, les dispositions fondamentales du Code des sociétés & des associations (CSA)[1] qui règlent les modalités d’entrée et de sortie des actionnaires de SRL[2], en dehors des procédures judiciaires en exclusion et en retrait, censées contribuer à la résolution des conflits internes (art. 2:60 et s.).

Introduction

Les fondateurs d’une SRL, qui – on le rappelle – est dépourvue de capital, doivent veiller à ce qu’elle dispose de « capitaux propres de départ » qui, compte tenu d’autres sources de financement, sont suffisants, à la lumière de l'activité projetée, pour que la société ait au moins une « espérance de vie » de deux ans (art. 5:3 et art. 5:4).

Un article des statuts précise le nombre d’actions émises en contrepartie des apports, qui doivent être intégralement et inconditionnellement souscrites. Sauf disposition contraire de l’acte constitutif, tous les apports sont intégralement libérés dès la constitution.

L’absence de capital permet une grande flexibilité dans l’attribution de droits – qualifiés de « négociés » – aux actions. Les seules contraintes sont précisées aux articles 5:40 et suivants :

  • la société doit émettre au moins une action et une action au moins a le droit de vote ;
  • les droits de vote ne peuvent être attachés qu'aux actions ;
  • chaque action est émise en contrepartie d'un apport ;
  • chaque action participe au bénéfice ou au boni de liquidation et, sauf disposition statutaire contraire, elle donne droit à une part égale du bénéfice et du boni ;
  • sauf disposition statutaire contraire, chaque action donne droit à une voix.

L’entrée et la sortie d’actionnaires à l’occasion d’un transfert d’actions (art. 5:63 et s.)

Tout transfert d'actions (vente, donation, héritage…) est, en principe, soumis à l'agrément écrit d'au moins la 1/2 des actionnaires possédant 3/4 au moins des actions, déduction faite des actions concernées. Les statuts peuvent renforcer, assouplir ou exclure cette exigence.

Cet agrément n'est pas requis si les actions sont cédées/transmises à un autre actionnaire[3], au conjoint/cohabitant légal du cédant ou à ses ascendants/descendants en ligne directe.

L’actionnaire désireux de vendre toute ou partie de ses actions soumet une demande d’agrément à l’organe d’administration, qui organise la procédure en réunissant les autres actionnaires en assemblée ou en sollicitant leur accord. En cas de refus, les parties à la cession envisagée peuvent saisir le président du tribunal de l'entreprise siégeant comme en référé, en veillant à appeler à la cause la société et les actionnaires opposés à la cession. Si le refus est considéré comme arbitraire, le jugement vaut agrément, sauf si l'acheteur retire son offre dans un délai de 2 mois suivant la signification du jugement[4].

A défaut d’avoir été agréés, les héritiers et les légataires[5] ont droit à la valeur des actions transmises, à charge des actionnaires survivants ou de la société. Une demande de rachat peut être adressée à l'organe d'administration, qui en transmet une copie aux actionnaires opposés. A défaut d'accord entre parties ou de dispositions statutaires, les prix et les conditions seront déterminés par le président du tribunal de l'entreprise, siégeant comme en référé, à la requête de la partie la plus diligente, la société et les actionnaires opposés étant appelés à la cause.

Enfin, les statuts ainsi que les conditions d'émission ou les conventions entre actionnaires peuvent limiter la cessibilité entre vifs ou la transmissibilité à cause de mort des actions. Mais les conventions ou les conditions ne peuvent assouplir les exigences légales ou statutaires.

L’entrée d’actionnaires dans le cadre de l’émission d’actions nouvelles (art. 5:120 et s.)

L'émission d'actions nouvelles, auxquelles pourront souscrire, le cas échéant, de nouveaux actionnaires effectuant des apports supplémentaires, nécessite une modification des statuts par l’assemblée générale (majorité des 3/4)[6].

Préalablement à cette décision, l'organe d'administration rédige un rapport dans lequel il justifie le prix de l'émission des actions et décrit les effets de l’opération sur les droits des actionnaires. Dans les SRL dotée d’un commissaire, ce dernier évalue, dans un second rapport, si les données financières et comptables contenues dans le premier sont fidèles et suffisantes pour éclairer l'assemblée générale. Si les actions ne sont pas émises en contrepartie d'un apport en nature, l'assemblée générale, à laquelle tous les actionnaires sont présents ou représentés, peut renoncer, par une décision unanime, à ces rapports.

S’agissant d’apports en espèces, l’entrée de nouveaux actionnaires implique de déroger au droit de préférence, en vertu duquel les actions à souscrire en numéraire sont offertes par préférence aux actionnaires existants, proportionnellement au nombre d'actions détenues[7].

Les statuts ne peuvent ni limiter ni supprimer a priori le droit de préférence[8]. Il revient à l'assemblée générale d’y déroger dans l'intérêt social lorsqu’elle décide de l'émission d'actions nouvelles. La proposition doit être annoncée dans la convocation et la décision est prise dans les mêmes conditions que pour modifier les statuts. Dans les rapports précités, d’une part, l'organe d'administration justifie les raisons de la dérogation et en précise les conséquences sur les droits des actionnaires, et, d’autre part, le commissaire évalue si les données financières et comptables permettent un vote en connaissance de cause[9].

Quand le droit de préférence est limité ou supprimé en faveur d'une ou plusieurs personnes déterminées qui ne sont pas membres du personnel, l'identité du ou des bénéficiaire(s) doit être mentionnée dans la convocation et dans le rapport de l'organe d'administration, où on trouve également la justification de l'opération et du prix d'émission, en tenant compte de la situation financière, de l'identité des bénéficiaires et de la nature et l'ampleur de leurs apports. Le commissaire émet une évaluation circonstanciée de la justification du prix d'émission[10]. Si le bénéficiaire détient des actions auxquelles sont attachés plus de 10 % des droits de vote, il ne peut pas participer au vote[11].

La sortie d’actionnaires lors de l'acquisition d'actions propres (art. 5:145 et s.)

Certains actionnaires peuvent quitter la société dans le cadre d’une opération d’acquisitions d’actions propres menée par la société, qui doit répondre aux conditions suivantes :

  • l'acquisition est autorisée par une décision préalable de l'assemblée générale, prise dans le respect des conditions requises pour modifier les statuts (majorité des 3/4);
  • la somme affectée à l’acquisition est susceptible d'être distribuée conformément aux articles 5:142 et 5:143 (tests de solvabilité et de liquidité[12]) ;
  • les actions concernées sont entièrement libérées ;
  • l'offre d'acquisition est adressée, aux mêmes conditions, à tous les actionnaires, sauf si l'acquisition est décidée à l'unanimité par une assemblée générale à laquelle ils sont tous présents ou représentés.

L'assemblée générale ou les statuts fixent le nombre maximum d`actions à acquérir, la durée pour laquelle l'autorisation est accordée ainsi que les contre-valeurs minimales et maximales.

La société ne peut céder ultérieurement les actions propres qu’elle a acquises qu'en vertu d'une décision prise dans le respect des conditions requises pour la modification des statuts. Les actions sont proposées par préférence aux actionnaires existants proportionnellement au nombre d'actions qu'ils détiennent.

Lorsque la société acquiert ses propres actions, le rapport de gestion comporte les motifs d’acquisitions, le nombre d'actions acquises durant l’exercice, la contrevaleur des actions et le nombre de toutes les actions propres détenues en portefeuille. Quand la société a cédé ses propres actions, le rapport précise le nombre d'actions vendues, les contrevaleurs et l’identité des acquéreurs.

La sortie d’actionnaires à la suite de démissions et d’exclusions (art. 5:154 & 5:155)

- Les statuts des SRL peuvent reconnaître aux actionnaires le droit de « démissionner à charge de son patrimoine », c’est-à-dire d’en sortir en obtenant le remboursement de leurs apports. A défaut de clause statutaire, les actionnaires d’une SRL ne peuvent pas démissionner, contrairement à ceux d’une SC auxquels le CSA reconnaît directement ce droit sans conditions.

Les modalités d’une démission sont définies par les statuts, étant entendu qu’il est interdit aux fondateurs de démissionner avant le 3ème exercice suivant la constitution.

A défaut d’indication dans les statuts :

  • un actionnaire ne peut démissionner que durant les 6 premiers mois de l'exercice ;
  • un actionnaire démissionne pour l'ensemble de ses actions, qui sont annulées ;
  • la démission prend effet le dernier jour du 6ème mois de l'exercice ;
  • la valeur de la « part de retrait » afférente aux actions pour lesquelles l'actionnaire démissionne doit être payée au plus tard dans le mois suivant.

Les statuts prévoient souvent que la démission requiert l'accord préalable de l’organe d’administration statuant à la majorité simple des voix présentes ou représentées, à l’exclusion de l’éventuelle voix de l’actionnaire-administrateur qui souhaite démissionner.

L'organe d'administration fait rapport à l'assemblée générale des demandes intervenues au cours de l'exercice précédent (identité des démissionnaires, nombre d'actions concernées, montants versés…) et met à jour le registre des actions (démissions, dates et montants versés), la démission ne prenant effet qu’à partir de cette inscription.

Pour éviter de devoir modifier trop souvent les statuts, les démissions et les modifications statutaires corrélatives sont établies, avant la fin de chaque exercice, par un acte authentique reçu à la demande de l'organe d'administration.

- Les statuts peuvent aussi prévoir qu’en cas de décès, faillite, liquidation ou interdiction d'un actionnaire, ou s’il ne répond plus aux exigences statutaires, celui-ci est réputé démissionnaire de plein droit. L'actionnaire ou, selon le cas, ses héritiers, créanciers ou représentants reçoivent la valeur de sa part de retrait, sans que les délais précités soient applicables.

- Les statuts peuvent prévoir que la société peut exclure un actionnaire pour de justes motifs ou pour tout motif précisé dans les statuts. Seule l'assemblée générale est compétente à cette fin et elle doit motiver sa décision. Les statuts prévoient le plus souvent qu’elle statue à la majorité des 3/4 des voix présentes/représentées, à l'exclusion de l’actionnaire concerné.

La proposition motivée d'exclusion est communiquée à l’actionnaire, par email ou par pli recommandé. Il est invité à faire connaître ses observations par écrit à l'assemblée générale, dans le mois de la communication de la proposition, et il doit être entendu à sa demande.

L'organe d'administration communique, dans les quinze jours, à l'actionnaire concerné la décision motivée d'exclusion et il inscrit l'exclusion dans le registre des actions.

Sauf disposition statutaire contraire, l'actionnaire exclu récupère la valeur de sa part de retrait et ses actions sont annulées.

L'organe d'administration met à jour le registre des actions (exclusions, dates et montants versés). Les exclusions et les modifications statutaires qui en découlent sont établies, avant la fin de chaque exercice, par un acte authentique reçu à sa demande.

- En ce qui concerne le remboursement, le CSA prévoit, de manière supplétive, que le montant de la « part de retrait » auquel a droit l’actionnaire est équivalant au montant libéré et non encore remboursé de ces actions, sans être supérieur au montant de leur valeur d'actif net telle qu’elle résulte des derniers comptes annuels approuvés.

Le remboursement aura lieu dans un délai fixé par l’organe d’administration (les statuts imposent parfois un délai maximum, tel que « douze mois à compter de la démission ou de l’exclusion »). Il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit d’une distribution impliquant la réalisation fructueuse des tests de solvabilité et de liquidité (art. 5:142 et 5:143). Indépendamment de ce que prévoient les statuts, si la part de retrait ne peut être payée en raison des résultats négatifs des tests, le droit au paiement est suspendu jusqu'à ce qu’une distribution soit à nouveau permise. Le solde restant dû est payable, sans intérêt, avant toute autre distribution.

Le cabinet Centrius est à votre disposition pour vous accompagner dans le cadre d’entrées ou de sorties d’actionnaires de SRL, quelles qu’en soient les causes et les modalités.

Si vous souhaitez en savoir plus, contactez-nous (info@centrius.be – 0484/681.081 – 064/70.70.70 – www.centrius.be). 

Me David BLONDEEL & Me Yves DE CORDT

[1] Toutes les dispositions légales citées sont des articles du CSA.

[2] Pour de plus longs développements, voy. J. Malherbe, Y. De Cordt, Ph. Lambrecht, Ph. Malherbe & H. Culot, Précis de droit des sociétés, Bruxelles, Larcier, 2020, pp. 797 et s. et pp. 815 et s.

[3]A propos du squeeze-out (tout actionnaire possédant au moins 95 % des actions d'une SRL peut faire une « offre de reprise » pour acquérir le solde : https://www.centrius.be/la-procedure-de-squeeze-out-dans-les-srl-ce-qu-il-faut-savoir/?_gl=1*1g86gs9*_up*MQ..*_gs*MQ..&gclid=CjwKCAjw89jGBhB0EiwA2o1On2UMuQyv5nU-Flc0DSrSZ5Cf9nwbqXTFmF3OEjmY3n16EYokypZvdRoCRJQQAvD_BwE&gbraid=0AAAAAoaTXmtV_oqe4raOQafDYB7pcsy1p

[4] Pour une analyse approfondie : https://www.centrius.be/le-refus-d-agrement-d-une-cession-d-actions-de-srl-quels-sont-les-recours-possibles/?_gl=1*1a0ktao*_up*MQ..&gclid=CjwKCAjw89jGBhB0EiwA2o1On2UMuQyv5nU-Flc0DSrSZ5Cf9nwbqXTFmF3OEjmY3n16EYokypZvdRoCRJQQAvD_BwE&gbraid=0AAAAAoaTXmtV_oqe4raOQafDYB7pcsy1p

[5]Selon l’art. 5:21., en cas de décès d’un actionnaire unique, les droits afférents aux actions sont exercés, sauf disposition statutaire contraire, par les héritiers et les légataires proportionnellement à leurs droits dans la succession, jusqu'au jour du partage ou de la délivrance des legs. Par dérogation et sauf disposition statutaire, testamentaire ou conventionnelle contraire, l'usufruitier des actions exerce tous les droits y attachés.

[6] En vertu de l’art. 5:134, les statuts peuvent conférer à l'organe d'administration le pouvoir d'émettre des actions nouvelles (autorisation valable 5 ans à compter de la publication de l'acte constitutif/modification des statuts).

[7]Le droit de préférence peut être exercé pendant un délai – fixé par l'assemblée générale ou l'organe d'administration – qui ne peut être inférieur à 15 jours à dater de l'ouverture de la souscription (art. 5:129).

[8] Il n'y a pas de dérogation au droit de préférence si chaque actionnaire y renonce lors de la décision d'émettre des actions nouvelles. L'ensemble des actionnaires doit être présent ou représenté à l’assemblée générale.

[9] En l’absence de commissaire, cette déclaration est faite par un réviseur d'entreprises ou un expert-comptable certifié désigné par l'organe d'administration.

[10] En l’absence de commissaire, cette déclaration est faite par un réviseur d'entreprises ou un expert-comptable certifié désigné par l'organe d'administration.

[11] Aux actions qu’il détient, sont ajoutées celles détenues par des tiers agissant pour son compte, des personnes  liées et des personnes agissant de concert.

[12]Quant à ces tests, voyez : https://www.centrius.be/tests-distributions/?_gl=1*st58ls*_up*MQ..&gclid=CjwKCAjw89jGBhB0EiwA2o1On2UMuQyv5nU-Flc0DSrSZ5Cf9nwbqXTFmF3OEjmY3n16EYokypZvdRoCRJQQAvD_BwE&gbraid=0AAAAAoaTXmtV_oqe4raOQafDYB7pcsy1p

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